Depuis plus de 10 ans que le web existe, la gratuité domine sans partage. Les tentatives de services payants se soldent quasiment toutes par des échecs: il suffit de voir que peu de chiffres sont communiqués sur les formules payantes des magazines en ligne ou des sites de téléchargement de musique pour comprendre que la situation n’est pas glorieuse.
Les quelques exceptions que sont les réussites (massives) d’eBay, Google, ou iTunes ne font pas oublier la situation généralement difficile des services web payants. Comment expliquer qu’il est encore aussi difficile de développer un service payant? Les utilisateurs ne peuvent-ils pas devenir des clients?
Les coûts de ces services ne sont pas nuls, et le gain retiré par l’utilisateur est lui aussi positif. Lorsqu’un utilisateur utilise un moteur de recherche, il en retire un gain, car il a gagné du temps et a obtenu l’accès à une information autrement difficile (voire impossible) à obtenir autrement. Pourtant, l’expérience a beau être positive, je doute que nombre d’internautes soient prêts à payer pour lancer une recherche, quel que soit le moteur.
Est-on dans une situation où le coût, le prix et le bénéfice utilisateur sont dissociés? En raison de l’immatérialité des services, renforcée par l’aspect impersonnel de l’informatique et l’aspect lointain de ces services web? L’internaute a-t-il l’impression que le service qu’il utilise est si facile d’accès et d’usage qu’il a du mal à en percevoir le coût et la valeur?
Pas nécessairement. Les utilisateurs ne paient pas… simplement parce que personne ne le leur demande. En effet, les modèles économiques se basent de moins en moins sur la collecte de revenus auprès des utilisateurs finaux, et glissent vers la publicité, le sponsoring, ou la revente de données plus ou moins personnelles.
Il s’agit d’une tendance de fond qui se développe dans l’économie en général: qui aurait cru il y a une dizaine d’années que l’on distribuerait gratuitement des quotidiens ou des magazines? La télévision fonctionne sur ce modèle depuis ses premiers jours, il est donc logique que les autres supports de contenus ou d’audience s’intéressent au tout gratuit. De plus, le web a pour lui des avantages non négligeables pour séduire annonceurs er partenaires commerciaux: mesures d’audience et de performance précises, récolte de données de profiling faciles, etc.
Voilà une des clés du succès sur le web: développer l’audience pour atteindre une masse critique, et pouvoir ensuite la monétiser sous une forme ou une autre (profiling, partenariats, publicité par affichage de bannières, AdSense, etc.). Google, MySpace, YouTube ou Flickr, sans oublier les portails et sites d’information; tous les ténors font dans le gratuit avec publicité.
Les services web sont gratuits parce que les rendre payants n’a pas de sens dans le modèle économique majoritairement adopté en ce moment. Les quelques formules payantes, « premium », ne génèrent pas de revenus substantiels, et font office de cerise sur le gâteau.